Un parc éolien sans recours, c’est possible !
Le premier parc éolien citoyen de Charente-Maritime est en fonctionnement à Andilly-les-Marais depuis 2024. Et fait notable : il n’a fait l’objet d’aucun recours ! Dans le cadre du parcours d'initiation des élus ruraux aux énergies renouvelables, le maire de la commune, Sylvain Fagot, partage son expérience. Un témoignage précieux pour mettre en lumière les facteurs de réussite de ce projet, où les citoyens ont été impliqués de A à Z.
S’approprier l’énergie de son territoire
Lorsque l’équipe de Sylvain Fagot est élue à la mairie d’Andilly-les-Marais (17) en 2014, elle est immédiatement démarchée par des développeurs tant le territoire est propice au développement éolien. Les élus mesurent alors l’enjeu de s’approprier le sujet, et plus largement celui du développement des énergies renouvelables sur la commune, jugé stratégique et potentiellement clivant. En 2017, le conseil municipal vote une délibération en faveur de l’implantation d’un parc éolien et lance un Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) pour avoir la main sur les critères de sélection du futur développeur.
Dans le cahier des charges de cet AMI, le volet “citoyen” fait partie des priorités. Il s’agit de les impliquer dès la phase de concertation, de communiquer avec transparence sur chacune des étapes, pour éviter la posture du “spectateur” mis devant le fait accompli.
Un groupe d’élus constitué en jury reçoit donc 6 développeurs, et c’est Valorem qui est retenu. L’équipe municipale, néophyte sur l’éolien, décide de faire appel à l’association “À nous l’énergie renouvelable et solidaire 17” qui avait déjà une expérience sur des projets participatifs et citoyens, notamment sur l’Île d’Oléron.
De l’importance de la concertation !
Un comité de pilotage se constitue alors, et la commune d’Andilly décide d’y associer plusieurs acteurs territoriaux : la communauté de communes dont elle fait partie (Aunis Atlantique) par ailleurs inscrite dans une dynamique TEPOS, la Région Nouvelle-Aquitaine, et son fond d’investissement Terra Energies.
Les 5 partenaires ainsi réunis (la commune, le développeur, la communauté de communes, la région et l’association “À nous l’énergie renouvelable et solidaire 17”) décident de signer un protocole de co-développement, une étape structurante dans le projet pour ancrer une méthodologie de travail transparente au sein du copil, avec la population, et l’ensemble des parties prenantes du territoire.
Très rapidement, les habitants sont conviés à des ateliers réguliers (tous les 3-4 mois) pour partager les avancées du projet. Par exemple, ils sont invités à échanger sur la zone d’implantation préférentielle (même s’il est rappelé que les études techniques et environnementales viendront déterminer le positionnement des éoliennes). D’autres partenaires territoriaux sont associés aux réunions dès le début du projet, que ce soit l’Etat via la DREAL, les communes voisines, ou encore des associations comme la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO).
Pourtant réputé pour ses positions anti-éoliennes, le Conseil Départemental des Charentes Maritimes émet un avis positif sur le parc d’Andilly lors de son passage en commission préfectorale. Le projet semble en effet inattaquable grâce à son développement fait de transparence et de concertation. L’arrêté préfectoral portant autorisation paraît le 16 septembre 2021, la période des recours s’ouvre alors : calme plat ! Purgé de tout recours, le projet est lauréat de l’appel d’offre de la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE), la commune d’Andilly-les-Marais est officiellement prête à accueillir ses éoliennes.
Un projet hors norme, une fierté locale
Sylvain Fagot nous partage sa fierté quant aux éoliennes installées sur sa commune. Et pour cause, c’est un projet de grande envergure, avec l’installation de 3 éoliennes de 5,6MW chacune (soit un parc de 16,8 MW au total). La technologie a évolué, les machines sont très puissantes (pour comparaison : les éoliennes de la commune voisine ont 15 ans et font 2,3 MW). Avec des mâts de 200m de haut et des pales de 80m de long (contre 40 à 50m habituellement), ce sont les éoliennes les plus hautes de France.
Elles ont été montées en un temps record (1 mois et demi), l’arrivée des pales par la mer puis leur convoi nocturne jusqu’au site a suscité un réel enthousiasme local : des centaines de personnes se sont rassemblées au bord de la route pour applaudir l’événement, non sans étonner les convoyeurs peu habitués à un tel accueil ! Le maire de la commune relève que c’est “la particularité d’inclure la population, ils sont fiers du projet”.
L’élu reste toutefois conscient des réticences de quelques citoyens : “Je ne dirais pas que 100% des Andillais sont satisfaits d’avoir des éoliennes. Notre commune fait 2500 habitants, et on a comptabilisé entre 25 et 30 personnes opposées au projet par peur de dépréciation foncière. Bien que 3 éoliennes soient montées sur la commune, on a un projet de 150 constructions et les terrains se vendent très bien, à des prix qu’on n’avait jamais connus auparavant. Les griefs sur le foncier ont donc vite été balayés. La seule nuisance difficile à objectiver, c’est l’aspect visuel. Mais comme dirait Bourdieu, c’est une histoire de goût ! Des gens trouvent ça très beau, d’autres non.”
Les citoyens au coeur de la gouvernance
Pour le financement et la gouvernance d’un tel projet (33,9 millions d’€), la commune, l’EPCI et l’association ont décidé de créer une société citoyenne, la COOPEC, regroupant leur 3 voix pour assurer la majorité citoyenne au sein de la gouvernance (la 4ème voix appartenant au développeur Valorem, et la 5ème au fond d’investissement régional Terra Énergies). Ainsi, même si le développeur détient 51% des parts du projet, il demeure minoritaire dans la gouvernance.
Une levée de fonds citoyenne a également été organisée, à travers des comptes courants d’associés proposés aux citoyens sociétaires de la COOPEC, qui compte aujourd’hui 183 sociétaires (les collectivités locales, quelques entreprises et des citoyens de tout âge). Cela a permis à la COOPEC de contribuer à l’apport en fonds propres à hauteur de 1,2 millions d’€. Pour encourager le passage à l’acte, une prime à la participation citoyenne a été soutenue par la Région Nouvelle-Aquitaine, qui a versé 1€ pour chaque € citoyen investi, permettant de réunir 45 000€.
Maintenant que les éoliennes produisent de l’électricité renouvelable, citoyenne et locale, les habitants d’Andilly-les-marais seront conviés une fois par an pour rester informés et impliqués dans la vie du parc. Les retombées économiques du projet bénéficieront directement au territoire, en finançant des travaux d’économie d’énergie et des actions de lutte contre la précarité énergétique. Et la commune ne compte pas s’arrêter sur une si belle victoire : un parc photovoltaïque au sol pourrait voir le jour sur l’ancienne déchetterie communale ! C’est la COOPEC qui porte ce projet, avec un niveau de transparence et de concertation tout aussi exigeant, en partenariat avec un développeur sélectionné avec soin. 👏☀️👏⚡👏
Accéder au replay
Vous pouvez visionner le témoignage vidéo de Sylvain Fagot, maire d’Andilly-les-marais, en replay à ce lien (25 min).
Vous pourrez également consulter les slides de présentation du projet éolien de la commune.
Le témoignage a été enregistré le 25/04/2024, dans le cadre du parcours d’initiation des élus ruraux au développement des énergies renouvelables proposé par le réseau Cler en partenariat avec l’AMRF.
Rejoindre le parcours
Dans la continuité du Grand atelier des maires ruraux pour la transition écologique, le réseau Cler et l’Association des Maires ruraux de France ont lancé un parcours d’initiation des élus ruraux aux énergies renouvelables, intitulé « Énergies renouvelables : les clés pour vous lancer ».
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